Je regarde ma montre. Dix heures et demi. Il fallait ce matin que je travaille pour me faire un emploi du temps qui me servira pendant les vacances, car comme d'habitude, et ce depuis ma première année, je reste à Poudlard. Hors de question que j'aille perdre mon temps à Londres, je n'y vois aucun intérêt. Et j'aime plus que tout le château pendant les vacances, il est calme, paisible, et surtout presque vide : l'idéal donc pour avancer sans perturbation aucune. Soigneusement, je range mes affaires dans mon sac, prenant garde à ne froisser aucun parchemin au passage, et m'éclipse de la salle d'études. Mon objectif ? Retrouver Alyssa. Non, ça ne fait pas partie de mon organisation. Ou si, en fait, seulement pas de l'habituelle, mais j'avais d'ores et déjà prévu de passer un peu de temps avec elle avant qu'elle ne parte. J'ai l'impression ces derniers temps qu'on ne s'est pas beaucoup vues... ou peut-être est-ce moi qui ne l'ai pas permis... je ne sais pas... peu importe. D'un revers de la main, je balaye ces questionnements tandis que mes pieds, eux, foulent les dalles de ces infinis couloirs.

Il m'aura fallu de longues minutes de recherches avant de trouver la blonde, du dortoir – où j'ai pu posé mes affaires – à la Grande Salle, en passant par le terrain d'entraînement. Et c'est d'ailleurs en revenant de ce dernier que je l'aperçois enfin. Je reste interdite. Mon sang ne fait qu'un tour en découvrant la scène qui se joue bien plus loin : je vois Alyssa tête en bas sur une branche, et tenu dans cette position par Redose. Une vive colère me traverse, mais malgré tout, je tente de reprendre au mieux mes esprits, et inspire. J'inspire et contourne de loin l'arbre pour m'approcher discrètement, baguette en main. Et peu importe que Redose se soit assis le temps que j'arrive, une leçon doit être donnée et je compte bien le faire : j'effectue encore quelques pas avant de véritablement débarquer pour lancer :

- Locomotor Mortis. Tu vas ramper. Maintenant.

Ah, oui. J'allais presque oublier. Sans attendre une quelconque réaction, ma baguette effectue vers lui un mouvement aussi rapide que précis :

- Impedimenta. Alyssa, prend sa baguette. Je regarde le Gryffondor. Je sais que tu n'es pas très doué avec mais bon.

Un sourire carnassier teint mon visage. On va rire.

"Tu vas ramper" oui oui, non, j'ai la flemme de bouger et c'est pas comme si j'en avais l'intention maintenant, je suis très bien assit et mes jambes sont déjà emmêlées donc sortilège plus qu'inutile.
Quel traquenard tout de même, quel danger je dois affronter, une blondasse miniature qui embrasse des murs et une complice qui attaque les gens dans le dos, sûrement de peur, hm. Je dois le prendre comme un compliment ! Je me sens pas vraiment menacé de toute façon, alors certes, j'ai pas envie de lui donner ma belle Crenguța, mais bon, c'est pas comme si je pouvais y faire grand chose autant se laisser faire, de toute façon j'ai la flemme de faire grand chose.

Ouai donc en gros je comptais rien faire dans tout les cas, donc c'est une perte de temps et d'énergie pour l'autre meuf. La blondasse elle, j'm'en tape un peu, elle va faire quoi ? Me taper jusqu'à ce qu'elle se fasse mal aux poings ? C'est déjà arrivé à des gens, des bouffons genre Eli ou d'autres genre moldus.

- Mais oui, Aleuhzah, petite blondinette, viens prendre ma baguette chère fan. Ah et je sais que tu aimes frappé ce qui est inanimé mais épargne l'arbre, il n'a pas insulté ta famille contrairement au mur.

Bouffonne.
Souriant d'un large sourire vicieux, je suis sûr que c'est insupportable pour elle de ne serait-ce que de me toucher mais alors l'odeur, ça doit pas être très fun je me suis battu avec Eli pendant pas mal de temps juste avant, profite de l'odeur.

Alyssa avait passé une main sur sa nuque douloureuse avant d'ouvrir la bouche pour répondre au Gryffondor... Lorsque sa respiration se coupa en voyant soudainement Onyx surgir de nulle part pour lancer un sort sur le garçon. Les bras ballants, elle la regarda, interdite, jeter un deuxième maléfice en direction de Redose dans un mouvement aussi habile que rapide. Une foule d'émotions la traversa dans ces courts instants, alors qu'Onyx lui enjoignit subitement de prendre la baguette de l'entravé.

De la honte de s'être faite surprendre de la sorte... Elle n'était pas déjà apparue suffisamment faible devant son amie ? De la crainte... Qu'est-ce qu'Onyx avait pu voir précisément ? De la peur des représailles... Est-ce que Redose allait être encore pire avec elle après ? Ce fut ce dernier sentiment qui bloqua Alyssa face à la demande de sa meilleure amie.

- Je...

La voix d'Alyssa s'était éteinte dans sa gorge alors que Redose s'adressait à elle... Enfin, ce dernier semblait plutôt vomir son prénom ; ce ne fut que l'appellation "petite blondinette" qui confirma à l'esprit troublé de la jeune fille que de telles paroles lui étaient destinées. Le garçon semblait avoir un talent pour condenser en quelques phrases tout ce qui pouvait plonger Alyssa dans un pur état de colère ou de dégoût. Cette dernière resta plantée sur place, alors qu'elle sentait ses jambes commencer à flageoler et tout son sang s'en retirer. Ses poings se serrèrent, ses ongles s'enfoncèrent dans sa peau.

Une brise lui amena alors une odeur écœurante provenant tout droit de Redose, un fumet qu'elle n'avait pu sentir plus tôt -étant bien trop déconcentrée la tête en bas. Il puait. Littéralement. Son être entier soulevait en Alyssa un sentiment de dégoût total : il était là, flegmatique, sans même avoir bougé suite à tout de même deux sortilèges, se contentant de la fixer tout en prononçant des mots plus absurdes les uns que les autres. Lui donner un surnom rabaissant. La traiter de fan de sa personne. Lui rappeler les coups qu'elle avait portés, dans son énervement, à un mur au fin fond des souterrains.

Durant ces quelques instants, Alyssa fixa Redose, complètement livide. Elle lâcha à voix basse :

- Je veux pas le toucher...

Sa baguette était de toutes façons pas visible. Et il n'y avait pas moyen qu'elle ne touche ne serait-ce qu'un vêtement du Gryffondor. Elle redressa ensuite la tête vers Onyx et, sans croiser son regard, lui dit alors d'une voix un peu plus forte :

- Il s'est rien passé, t'inquiète pas. On peut s'en aller s'il te plait ?

Un tremolo avait parcouru sa dernière question qui avait été posée dans un ton presque suppliant, alors que ses yeux clairs se reportaient vers Redose qui dispersait en cet instant précis plus de la panique en son être que de la colère.

Blablabla, je fronce les sourcils, pourquoi il jacasse d'abord ? Avec son sourire vicieux là ?

- Flipendo. Ferme-la.

Mon visage s'arrête sur celui de mon amie qui... n'a pas l'air aussi déterminée que je le suis. Alyssa balbutie, reste en plan ; ses poings se serrent. Je ne suis pas très douée pour deviner ce que c'est, mais j'ai comme l'impression que c'est du stress. Mes sourcils s'arquent alors que cette dernière m'avoue qu'elle ne veut pas le toucher, et mon regard scanne le garçon ; malgré que mon nez ne soit pas assez proche de lui pour le faire de même, je comprends son refus. Ce que je comprends moins cependant, c'est la réaction qui suit : la tête blonde me ment très clairement, me racontant qu'il ne s'est rien passé. Sauf que moi, je l'ai vu. J'ai vu la façon dont il venait de la traiter, j'ai vu la scène, j'ai vu ses mains tenir son col. Et quoi ? Qu'est-ce que je suis sensée faire ? Accepter et lui dire "allons-y, un bon repas nous attend ?". Alors que je la vois devant moi, là, complètement livide ? Non. Bon déjà, tant pis pour la baguette ; de toute manière j'ai pris mes précautions, avec le sort qui l'entrave dans ses mouvements, il ne pourra pas faire grand chose pour le moment.

- On ne s'en va pas, non. Pas maintenant.

Je m'approche de lui – comprenant au passage que son odeur est réellement incommodante, ce qui me vaut une grimace – et pousse avec force le haut de son corps à l'aide de mon tibia, de façon à le renverser complètement.

- Limacius Eructo. Je t'avais dit de ramper. Je ne vais pas te faire de mal aujourd'hui Redose, mais tes actions auront des conséquences. En attendant, rigole bien en vomissant tes limaces. Rictusempra.

Un petit flipendo, ouch, ça fait mal, mais ça fera jamais aussi mal qu'une fessée de Charlie donc bon, même si je me suis un peu tordu car elle est assez forte, pas énormément mais c'est assez fort comme coup, je continue à sourire parce que tout ça n'est qu'un jeu pour moi. C'est amusant quand quelqu'un t'insulte et que t'en as rien à faire. C'est de l'humiliation tout simplement, ça veut dire "tu es énervée et tu essayes de me faire mal, je suis calme et je ris, tu es faible" et c'est ça qui est beau. C'est comme fouetter un lion mais le lion s'en fiche, on a pas l'effet escompté donc on est frustré. Moi-même si je frappais quelqu'un de toute mes forces et qu'il se mettait à rire ça m'énerverait et c'est pour ça que dans cette situation même si j'ai eu mal l'euphorie est plus forte que la douleur.

Quand l'autre meuf, hmm... Pet en colère pour rester dans la Gid'touch a exprimer son souhait de ne pas partir j'avais à la fois peur de la suite et j'étais excité de ce qui allait se passer, plus excité que terrifié à vrai dire, d'autant que la blondasse dont j'ai oublié le nom, prénom ou surnom (et j'm'en tape un peu des personnages sans importance de toute façon) est toujours là et la voir ainsi ce n'est que du bonheur ! J'espère qu'elle me craint, j'espère que mon sourire malgré tout les coups que je risque de me prendre la hantera littéralement toutes les nuits et à chaque fois qu'elle me verra moi ou le sourire de n'importe qui.

Oula, je m'égare, la briser si rapidement ne serait pas si fun.

Bweurh, le son d'un limace qui coule sur ma langue et descend, je peux bof bouger la tête ni les mains pour la ravaler, la lécher ou la lancer mais c'est pas grave, ce qui est drôle cependant c'est de rire et vomir en même temps, première fois que j'ai cette sensation, ça me fait rire. Mon rire a l'air tellement réelle parce que c'est vraiment plaisant à vrai dire, vomir ça fait du bien et le seul problème d'habitude c'est que ça fait un peu mal à la gorge à cause de l'acide sauf que comme ces limaces ne viennent pas de mon estomac mais de ma gorge, j'ai la sensation agréable d'être délivrer de quelque chose sans avoir la sensation désagréable de l'acide qui remonte et franchement, j'ai vraiment envie de me lancer le sort quand je serais seul maintenant pour en profiter sans voir les têtes des autres bouffonnes qui croient que faire rire quelqu'un est un problème et vomir des limaces est désagréable.

Il semblait qu'à l'instant où Onyx avait débarqué, la mascarade de courage qu'Alyssa avait érigée s'était lamentablement écroulée, ne laissant plus que l'ombre de la Gryffondor derrière. Incapable de réagir. Incapable d'obtempérer. Incapable de dire la vérité. Peut-être, ou même sûrement, que quelques semaines auparavant la blondinette aurait rejoint Onyx dans son combat sans l'ombre d'une hésitation ; mais là, il n'y avait plus moyen. La simple présence de Redose la bloquait complètement, par la réaction de ce dernier -ou plutôt sa non réaction- aux maléfices enchaînés par Onyx sans l'ombre d'un seul sentiment sur son visage juvénile.

Une moue découragée se dessina sur ses lèvres lorsque sa meilleure amie refusa de battre en retraite. Cette dernière n'en avait visiblement pas fini avec Redose. Ce fut d'un œil presque captivé qu'Alyssa contempla la vision d'Onyx qui poussait sans cérémonie le garçon d'un coup de tibias, une simple grimace planant sur son visage ; avant que cette dernière n'enchaîne avec deux nouveaux sortilèges. La voir ainsi agir dans une attitude en apparence parfaitement calme avait quelque chose de presque fascinant.

Lorsqu'Alyssa reporta son attention sur Redose, le peu d'expression sur son visage se figea alors qu'un frisson glacé lui traversait tout le dos. Alors que le Gryffondor était torse contre terre, les jambes bloquées, rampant presque comme une limace... Avec justement des limaces lui sortant de la bouche... Eh bien, il souriait, il riait. Il semblait apprécier ce moment, être heureux. Alyssa le contempla quelques instants, véritablement perturbée par une telle vision, se sentant plus perdue que jamais. Ses bras étaient restés ballant le long de son corps, sa bouche demeurait légèrement entrouverte -comme si elle était prête à dire quelque chose.

Mais il n'y avait plus de mots, ni dans sa gorge, ni dans son esprit. Elle se reporta, non, se raccrocha, aux yeux verts d'Onyx. Ses prunelles bleues étaient grandes ouvertes, se fondant dans la pâleur de son visage. Bien que muette, son corps ne semblait plus crier qu'une seule chose : Viens, on s'en va maintenant.

Je ne sais absolument pas comment interpréter les réactions du garçon, mais ce que je vois, c'est que son fichu sourire ne part pas de son visage. Mais est-ce important ? Je m'en fiche finalement, puisque celui-ci finit par se mêler au Rictusempra que je lui lance, et je le considère un instant dans cet état, étalé au sol, crachant des limaces tout en riant aux éclats. Ce qui est sûre, c'est que je le trouve tout à fait insignifiant. Mes yeux se lèvent et vont chercher ceux de ma camarade, que je retrouve totalement bloquée par je-ne-sais-quoi. Est-ce vraiment cette chose qui remue par terre qui la met dans cet état ? Est-elle vraiment perturbée par... ça ? Mon regard méprisant retombe une nouvelle fois sur le Gryffondor et je lui donne un tout petit coup pied, non pas pour faire mal, mais plutôt à l'image de ceux qu'on donne dans un objet lorsqu'on s'ennuie, pour faire comprendre à Alyssa qu'il n'est rien et que je pourrais en faire tout ce que je veux.

- Les limaces, ça s'écrase bien.

Une pensée me traverse. Je sais. Oui, je sais que sans ma baguette, seule devant lui, je ne serais pas grand chose non plus ; j'ai beau jouer au Quidditch depuis un an, avoir appris à frapper violemment les cognards avec une batte, je ne pense pas faire le poids. C'est d'ailleurs ce qui m'encourage, en plus des expressions d'Alyssa, à partir à présent. Les effets des sorts que j'ai lancé ne dureront pas éternellement et je préfère ne rien risquer ; la suite se fera autrement. Et elle se fera. Pour le moment, j'ai une baguette ainsi qu'un cerveau efficace. Haussant les épaules, je m'approche de mon amie, en gardant néanmoins un œil méfiant sur Redose, puis continue d'avancer pour lui ouvrir la marche vers la Grande Porte :

- On peut y aller maintenant, déclaré-je calmement.

Fin pour moi!

Les yeux clairs d'Alyssa rencontrèrent ceux verts d'Onyx. La blondinette se raccrochait à son regard, dans une énergie presque de désespoir, bien incapable de réagir autrement devant ce spectacle qui lui semblait cauchemardesque (Redose, rampant sur le sol, riant et crachant des limaces). Elle avait besoin d'un signe, ou plutôt d'un mouvement, d'une parole assez forte pour tout simplement... Savoir quoi faire.

Son trouble était clairement lisible sur son visage livide, et Onyx la connaissant d'autant plus, ce fut peut-être pour cela que la brune mima un petit coup de pied en direction de Redose. Les paroles qu'elle prononça alors tardèrent à résonner dans l'esprit embrumé d'Alyssa, jusqu'à y trouver écho. La blonde cligna ses yeux clairs. Oui, ici et maintenant Redose n'était guère plus qu'une limace sans intérêt. A côté, sa douleur à la nuque ne lui semblait plus si cuisante. Grâce à Onyx qui avait maîtrisé le garçon en quelques coups de baguette.

Instinctivement, Alyssa se reconcentra sur son amie, ne voulant surtout pas retomber aux prises de ce spectacle peu ragoutant qu'offrait le Gryffondor. Peut-être que le compte de ce dernier avait été réglé aujourd'hui, peut-être qu'Onyx lui avait montrée comment l'affronter, mais le désir de mettre le plus de distance possible avec Redose restait sa grande priorité. Elle avait besoin de s'éloigner au plus vite, avant que sa peur ne reprenne le dessus.

Onyx s'avança finalement en sa direction mais Alyssa était encore si tendue qu'elle ne s'autorisa pas même un souffle de soulagement. C'est bon, on peut partir ? La brune confirma alors par quelques mots sa question silencieuse avant de lui ouvrir la voie. L'élan de son amie délivra d'un coup de la paralysie qui faisait emprise depuis tout ce temps sur le corps d'Alyssa et dans un pas hâtif, la blondinette suivit la marche jusqu'au château ; occultant les rires de Redose qui s'élevaient vers le ciel.

Cependant, curiosité malvenue ou autre, alors que les deux filles arrivaient presque devant les portes du château qui avaient semblé si loin à Alyssa quelques instants plus tôt, celle-ci eut le réflexe de se retourner. Il était toujours là. Allongé sur le sol. Eclatant d'un rire qui lui glaça à nouveau les veines. La respiration de la Gryffondor se bloqua alors dans sa gorge, un violent frisson lui traversa la colonne vertébrale, jusqu'à ce que dans un effort lui semblant surhumain, elle se détourna pour de bon afin de suivre les pas de sa meilleure amie qui avait fait plus que de lui sauver la mise, aujourd'hui.